(CercleFinance.com) - Au beau milieu du creux estival, l'action Atos effaçait plus d'un milliard d'euros de capitalisation boursière en cédant près de 10% ce midi, ce qui en fait la plus forte baisse du CAC 40. En cause : des notes d'analystes négatives, surtout celle de Credit suisse qui s'interroge sur la manière dont le groupe tient compte de sa trésorerie. Alors que 0,7% du capital a déjà changé de mains ce matin, le titre perd désormais environ 15% de sa valeur depuis le début de l'année, vers 102 euros à cette heure.
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Que s'est-il passé ce matin ? Pas les comptes semestriels, que l'ESN a dévoilé le 23 juillet dernier, au lendemain de l'annonce d'une acquisition majeure aux Etats-Unis, Syntel. Des publications qui, d'ailleurs, avaient été sanctionnées en Bourse, le titre étant alors revenu d'environ 123 à 115 euros.
Après les mauvaises surprises d'Altran lors de l'intégration d'Aricent, autre grande affaire américaine, les analystes se sont inquiétés de cette opération. D'autant qu'au passage, Atos n'excelle pas par sa croissance organique : de 2,3% en 2017, elle est revenue à 2% au 1er trimestre 2018 avant de descendre encore à 1,5% au 2e trimestre. Alors que celle de Capgemini, par exemple, évolue sur ces mêmes périodes dans la zone des 6%.
Mais alors ? Deux bureaux d'études sont revenus sur le cas Atos ce matin, et tous deux sont vendeurs du titre. Il s'agit d'abord de Morgan Stanley qui, toujours négatif ('sous-pondérer') sur la valeur, a abaissé son objectif de 117 à 110 euros. La note évoque 'un premier semestre mitigé' : certes, les comptes publiés étaient globalement en ligne et la direction a confirmé les prévisions. C'est surtout l'acquisition de Syntel, opération à 3,4 milliards (alors qu'Atos capitalise 11 milliards d'euros environ), qui est mal passée. 'Cette acquisition diffère de la stratégie antérieure d'Atos', relève Morgan Stanley, le groupe ayant pour habitude de racheter des cibles relativement peu valorisées nécessitant d'importantes restructurations. L'accent était donc mis davantage sur les synergies de coûts que celles de revenus, et Atos avait prouvé son savoir-faire en la matière.
Or le cas Syntel change la donne en renforçant l'exposition d'Atos à un marché plus vaste, mais aussi plus concurrentiel : l'Amérique du Nord. Le tout avec une plus forte présence offshore. En outre, Atos paiera la cible suivant un ratio de 19 fois la valeur d'entreprise / résultat d'exploitation, et un PER de 21 fois. Alors que son propre PER est de l'ordre de 13 fois. Enfin, ce faisant, Atos épuise ses munitions de M&A et encourt un risque d'intégration, indique une note.
Mais c'est Credit suisse qui est le plus virulent. Déjà peu enthousiaste sur le titre sur lequel son précédent conseil était neutre, le bureau d'études est passé à la vente ('sous-performance') ce matin en émettant des doutes comptables. L'objectif de cours est réduit d'environ 32% et revient de 117 à 80 euros.
Les spécialistes mettent l'accent non pas sur la croissance ni sur Syntel, mais sur la comptabilisation de sa trésorerie par Atos. Dernièrement, relèvent-ils, le cash flow s'est accru, une bonne chose dans l'absolu. Mais Credit suisse estime qu'environ 30% de l'amélioration du cash flow libre constatée ces dernières années provient 'd''arrangements financiers'' (selon l'expression utilisée à de nombreuses reprises dans la note de recherche) plutôt que de raisons fondamentales. Credit suisse intègre sa 'découverte' dans ses calculs et abaisse en conséquence son objectif.
Comme une invite à Atos, Credit suisse écrit aussi que son objectif pourrait être remis en cause si la direction parvenait à rassurer. 'Le seul éclaircissement que nous ayons obtenu (d'Atos) est que ces arrangements financiers constituent 'simplement des modalités de paiement habituelles' avec les clients. Mais nous ne sommes pas sûrs de comprendre pourquoi ces schémas habituels doivent être publiés avec les comptes annuels', indique la note. A suivre ?
La mise en cause de la sincérité des comptes fait partie des 'crimes boursiers' les plus graves dans la mesure où ces documents, établis suivant des procédures aussi rigoureuses qu'ils sont dûment certifiés, constituent la 'Bible' pour la valorisation d'une entreprise cotée. On pourrait présenter Steinhoff, le distributeur allemand dont les comptes ont, des années durant, masqué la réalité avant l'implosion finale, comme l'archétype récent de cette 'sensibilité comptable'.
Même si le cas d'Atos n'a, pour l'heure, absolument rien à voir. Et que la torpeur estivale peut également expliquer la vigueur de la réaction du marché.
Prochain événement inscrit sur l'agenda du groupe : les ventes du 3e trimestre, le 23 octobre.
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